Je m'étais promis de faire sur le sujet un billet un peu plus sérieux que celui-ci, et à force de voir des pubs pour les régimes et d'en entendre parler, j'ai décidé de me lancer. Aucun rapport avec la littérature, me direz-vous ? Ça reste à voir. Quand on voit la place (si précieuse et si chère) que prennent sur les étagères des libraires les dernières recettes miracles de régime, on peut tout de même craindre l'invasion. Sans compter que si vous êtes un jour un auteur célèbre, vous aurez la chance inénarrable de vous faire démonter sur le plateau de "On a tout essayé" au milieu d'une bande de crevettes anorexiques... voilà qui n'aide guère à garder sa confiance en soi. L'allusion à cette émission n'est pas anodine, d'ailleurs. Il se trouve qu'en un temps lointain, je la regardais presque tous les soirs (sic !) et que j'ai eu l'occasion d'y voir passer un nutritionniste qui présentait justement un livre. Il y expliquait le principe de l'IMC (indice de masse corporel égal à votre poids divisé par votre taille au carré) qui doit se trouver entre 18 et 25. Là, les chroniqueurs se sont mis à donner chacun le leur et toutes les femmes présentes ce soir-là avaient un indice qui tournait autour de 18 et même en-dessous vers les 16 pour l'une d'elles. Et donc, le "médecin" lui disait "Dans votre cas, c'est particulièrement bien" et moi, derrière mon écran, j'ai manqué m'étouffer. "Compris entre" ne signifie pas "en dessous de", à moins de 18 en IMC vous n'êtes pas plus en bonne santé que quelqu'un à plus de 25. Je m'étais fait la même réflexion le jour où un styliste a expliqué pourquoi les mannequins se devaient d'être maigres. Parce que "les gens ont envie de voir des personnes qui respirent la bonne santé" (j'en ai entendu des absurdités pour défendre les mannequins porte-manteaux, mais celle-là témoignait d'une bêtise assez exceptionnelle !)
Récemment, j'ai entendu une émission sur France Info où un nutritionniste venait parler des régimes (et notamment déconseiller toute forme de régime à la mode avec consommation ou privation d'une nutriment en particulier... ce en quoi je lui donne à 100% raison). La journaliste lui posait sa première question en ces termes "Que conseillez-vous de faire quand on veut perdre du poids ?" ce à quoi il répondait "diminuer les portions". Je ne peux pas lui donner tort, mais j'aurais aimé que la première chose qu'il précise soit "Vérifier que l'on a besoin de perdre du poids". Je pense que cette quête maladive de la maigreur est une des premières causes du surpoids qui se développe de plus en plus. Oui, la sédentarité joue pour beaucoup, mais celle-ci n'est pas récente. Bien sûr, le phénomène empire avec la multiplication de loisirs qui ne demandent aucune dépense physique (sur ce point la Wii amènera peut-être un petit mieux). Mais l'effet yoyo des régimes privatifs est loin d'être innocent en la matière. Vous avez comme ça des gens qui ont un IMC de 22 au départ, aucun surpoids médical donc, mais pas de quoi s'exposer dans des magazines à la mode et pas moyen de rentrer dans les jeans taille 36 qu'on vous impose comme la norme. Et nous voici donc en train de nous gaver de protéines en sachet (oui, je peux en parler, je l'ai fait), tout juste compléter par un peu de salade verte. Pour tomber à un IMC de 20, par exemple. Puis le régime s'achève et que se passe-t-il ? Vous vous rendez compte que vous recommencez à grossir, alors vous recommencez. Sauf que ces régimes sont très chers, alors vous diminuez l'apport en protéines ou vous tentez toutes les autres âneries qui vous passent par la tête. Vous en venez à vous affaiblir au point de ne pas pouvoir faire 10 mètres avec un objet dans la main (vos clés par exemple) sans qu'il ne tombe parce que vous ne contrôlez plus assez vos muscles pour garder la main fermée. Vous avez des vertiges, le teint cireux, mais qu'importe ! Vous ne voulez pas perdre tous vos beaux efforts et, après tout, cette fatigue perpétuelle doit bien signifier que votre corps va chercher dans ses réserves, non ? Et pourtant, il vous suffit d'un quignon de pain ajouté à votre oeuf dur coupé en quatre quotidien (un quart à chaque repas) pour grossir. Comment est-ce possible ?
Vous finissez donc par aller voir un nutrionniste qui vous explique les choses simplement : le corps est une machine bien faite. Vous le privez, il cherche dans ses réserves, ok. Mais si vous le privez trop longtemps, il apprend à vivre avec moins (la rigueur ne fonctionne pas qu'en politique). Il vous prive de tas de choses que vous ne voyez même pas. Votre coeur renvoie le sang avec moins d'énergie d'où des vertiges, vos muscles sont atrophiés, absence de règles pour les femmes, etc... Le corps établit ses priorités en fonction d'un budget calorique de crise. Et quand vous faites un extra (un quignon de pain, si si !), il stocke pour tenir quand vous le priverez de nouveau.
Voilà d'où vient le fameux effet "yoyo". Les régimes peuvent bien vous promettre que non, avec celui-là pas d'effet yoyo, ce n'est jamais totalement vrai. Pour maigrir il faut priver le corps, quand le corps est privé il s'attend à d'autres privations et stocke dès que vous vous remettez à manger normalement. Seuls les régimes dit "à paliers" permettent d'éviter cela. Hélas, ce ne sont pas ceux qui vous font perdre 20 kilos en deux semaines pour rentrer dans votre maillot cet été.
Pour régler ce problème de poids qui obsède notre société, je crois qu'il faudrait déjà se rappeler que chacun a sa morphologie et qu'il ne sert à rien d'essayer de viser une maigreur à la mode quand on n'est pas fait pour. Ensuite, si on a de vrais problèmes de poids (regardez votre balance, elle vous ment moins que vos yeux et les vêtements taillés selon la mode), la seule solution c'est de revenir, petit à petit, à adapter notre apport calorique à nos besoins. C'est la raison pour laquelle je rigole doucement quand j'entends certains dire que le sport ne fait pas maigrir. En effet, si vous allez courir une demi-heure tous les jours pendant une semaine (en dehors du fait que vous risquez la crise cardiaque si vous n'avez pas l'habitude), vous allez prendre plus de poids que vous n'en perdrer, parce que la masse musculaire pèse plus que la graisse. Mais à long terme (et maigrir ne peut que se penser à long terme si on veut éviter de grossir de régime en régime), cela augmente votre masse musculaire, ce qui augmente également vos dépenses caloriques "passives". Le nombre de calories moyen dépensé par une personne sportive sur une journée standard est plus élevé que celui d'une personne non-sportive (donc vous pouvez manger plus sans grossir), sans compter les pics de dépenses caloriques lors de l'effort sportif.
Est-ce que pour autant je vais vous bassiner sur le fait de faire du sport tous les jours ? Non, ça n'irait pas avec ce précédent billet que j'ai fait. Vivez votre vie, c'est l'essentiel, même si du coup, elle doit être un peu plus courte. Mais par contre, si vous souffrez de votre surpoids et que vous commencez à vouloir prendre cette question en mains, faites gaffe à ne pas faire n'importe quoi sous l'influence de zozos qui s'intéressent bien plus à la façon de faire maigrir votre porte-feuilles que votre silhouette.
Et surtout n'oubliez pas, un corps assumé et un visage souriant passeront toujours mieux qu'un corps plus mince surmonté par le visage crispé d'une personne obsédée par sa ligne.